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Réalisations emblématiques

La petite histoire du parquet

  • 1719 : la Ville de Grenoble acquiert, auprès des descendants du Connétable les bâtiments du palais de Lesdiguières pour en faire un nouvel Hôtel de Ville. Une partie des lieux est réservée à l’Intendance du Dauphiné.
  • 1784 : Jean-François Hache, illustre ébéniste grenoblois (1730-1796), expertise le parquet mal conçu, mal exécuté et en fort mauvais état, du cabinet de l’Intendant, au rez-de-chaussée du bâtiment.
  • 1787 : à l’occasion de l’arrivée d’un nouvel intendant, Hache reçoit commande d’un nouveau parquet qu’il réalise entre avril et septembre.

Après exécution de gros travaux d’aménagement et d’assainissement du sol, et installation d’un plancher en châtaignier, avec lambourdes et solives en chêne et châtaignier, pose du parquet « en mosaïque » sans clous, ni chevilles, les frises entrelacées et les panneaux de neuf formes différentes en bois massifs dont deux incorruptibles en cèdre et acacia, les autres en meurier, frêne, loupe de noyer, etc., avec divers compartiments en buis, ébène, acajou et autres rapportés auxdits panneaux… ». 

« Les panneaux de ce nouveau parquet sont entremêlés de bois rares et incorruptibles, dont la propriété est d’écarter par leur odeur les insectes à 3 ou 4 pieds de distance et qui par conséquent en garantiront les autres… »

(in « Etat » des sommes dues à J. F. Hache, 15 septembre 1787, Archives municipales de Grenoble)

  • 1862 : malgré les précautions prises par Hache pour assurer la pérennité de son ouvrage, le parquet, « en état de décomposition », fait l’objet d’une réfection totale à l’identique, selon les plans et dessins originaux, par le parqueteur Régis Grange, de Domène.

L’antichambre avait, quant à elle, été re-parquetée de façon plus sommaire, en 1845-1847.

Mais le nom de Hache restera attaché au parquet :

« Si cette restauration ne nous a pas conservé l’œuvre matérielle proprement dite,…, elle a cependant permis de conserver l’œuvre dans sa conception artistique et l’équilibre de ses formes géométriques » (Dominique-Jacques Jalabert).

  • 1969 : après transfert des services municipaux dans le nouvel Hôtel de Ville au parc Paul Mistral (1967), classement au titre des Monuments Historiques de divers éléments de l’ancienne salle des mariages (aussi appelé « Salon grec » ou « à la Grecque ») : « les boiseries peintes, le parquet mosaïqué, la cheminée en marbre, le trumeau avec glace et panneau de toile peinte et la glace avec cadre sculpté et doré ».
  • 1970 : au mois de juillet, inauguration du musée Stendhal installé dans l’ancienne salle des mariages et son antichambre.

Auparavant, au cours du printemps, le parquet très altéré traité par la section d’application des radioéléments et des rayonnements  du Centre d’Etudes Nucléaires de Grenoble.

  • 2004 : le musée Stendhal ferme ses portes.
  • 2006 : la Maison de l’International s’installe dans les bâtiments où elle organise de nombreuses expositions, permettant ainsi au public d’apprécier le parquet dessiné par Jean-François Hache.

Une exceptionnelle opération de sauvetage

Le parquet en quelques chiffres :

  • Superficie : 155 m2 (9,30 x 7,30 m et 9,10 x 9,10 m)
  • Volume : 4,65 m3
  • 750 éléments composés d’un support en résineux recouvert d’une mosaïque de bois divers (environ 10 essences)
  • Panneaux carrés de 45 x 45 cm ; panneau central 135 x 135 cm; panneaux des bordures : 50 x 300 cm
  • Epaisseur des bois de la mosaïque : 9 à 3 mm
  • Poids total avant traitement : 2 tonnes
  • Poids total après traitement : 4,5 tonnes
  • Durée du traitement : 1 mois

Pourquoi traiter ?

En 1969, la Ville de Grenoble manifesta son intention de rénover le parquet, très altéré, de la salle des mariages de l’ancien Hôtel de Ville, destinée à devenir le musée Stendhal.

Depuis la réfection du parquet un siècle auparavant, certaines zones avaient été fortement attaquées par les moisissures et les insectes xylophages, ce qui avait largement contribué à amoindrir la résistance mécanique. L’épaisseur initiale des bois avait, par endroits, été réduite de 9 à 3 mm, une usure explicable par la forte fréquentation des lieux, et aussi l’usage -abusif selon certains !- de chaussures à talons aiguilles.

Louis de Nadaillac, ingénieur de la section d’application des radioéléments et des rayonnements au Centre d’Etudes Nucléaires de Grenoble, proposa alors à la Ville et au ministère des Affaires culturelles (direction de l’architecture) de transposer un procédé industriel de fabrication de « bois-plastique » (ou « bois densifié ») pour consolider, définitivement et à cœur, le bois de ce parquet historique.

Après de nombreux tests pour vérifier la tenue des colles anciennes, les variations de dimensions des bois ou leur déformation, le projet, innovant pour un bien patrimonial culturel, fut accepté.

Le traitement « Nucléart » -imprégnation de résine polymérisée (durcie) par irradiation- fut mis en œuvre entre mars et mai 1970.

Comment traiter ?

Après démontage et transport au CEA, les panneaux furent placés dans des cadres destinés à faciliter leur manutention et assurer leur protection.

Le traitement a, dès lors, véritablement commencé :

  • mise en place des cadres dans une cuve d’imprégnation où un vide partiel, destiné à
    chasser l’air des cellules du bois, a été établi pendant 5 heures,
  • introduction du monomère, le méthacrylate de méthyle, dans la cuve et mise sous
    pression d’azote pour favoriser l’imprégnation du bois, durant 16 h
  • irradiation sous rayonnement gamma, émis par des sources de cobalt 60, à une dose de
    20 kilograys pour polymérisation de la résine in situ, durant 8 h.
    Pour éviter les déformations des panneaux les plus grands, irradiation à plat et sous
    presse.

Certains panneaux carrés, légèrement déformés au cours du traitement, ont ensuite été
chauffés sous presse afin de faciliter leur repose.
Le traitement terminé, les panneaux furent réacheminés à l’Hôtel de Lesdiguières où le
remontage minutieux fut effectué sans difficulté par des menuisiers.

Les résultats du traitement :

  • Le bois est consolidé à cœur (composite, bois-résine) ; la surface du parquet, elle, est
    moins imprégnée et peut donc être entretenue de façon classique.
  • Les insectes xylophages et autres agents biologiques ne peuvent plus dégrader le bois.
  • Depuis 40 ans, le parquet est stable et se comporte de façon satisfaisante.

Un Pharaon face à la Science

C’est à l’initiative de Christiane Desroche-Noblecourt, alors conservateur en chef du département des antiquités égyptiennes au musée du Louvre, qu’est né le projet d’intervention sur la momie de Ramsès II.

Après une phase de diagnostic, il est apparu indispensable de traiter la momie  pour éradiquer insectes et espèces fongiques, responsables de la dégradation en cours.

L’équipe du projet Nucléart proposa l’irradiation au rayonnement gamma, à une dose de 18 kilograys. Toutefois, au préalable, il fallait vérifier que les effets des rayonnements gamma à ces doses ne risquaient pas de dégrader encore plus la momie.

L’irradiateur de Grenoble fût donc mis largement à contribution pour irradier de nombreux échantillons (dont certains en provenance de la momie de Ramsès II elle-même, mais déjà détachés et reposant sur le platelage supportant la momie) ainsi que d’autres momies, moins prestigieuses, utilisées à titre d’essais.

Citons par exemple les analyses effectuées sur des cheveux irradiés et non irradiés par le laboratoire l’Oréal (parce qu’il le valait bien !). Celui-ci ne vit aucun signe de dégradation supplémentaire dû à l’irradiation.

Au final,  c’est environ 100 personnes qui furent impliquées du 26 septembre 1976 au 11 mai 1977, dans les différents essais et études, sous la direction du doyen Balout, administrateur du musée de l’Homme, secondé par Christian de Tassigny, membre éminent du programme Nucléart, pour la partie traitement d’irradiation.

Le 9 mai 1977, la momie fût irradiée, sous la direction de Christian de Tassigny, au centre CEA de Saclay, dans un sarcophage d’emprunt et dans un caisson en plexiglass. Après son traitement, la momie de retour au Caire, fût réinstallée dans le musée des antiquités, le caisson en plexiglass étant aménagé en caisson stérile pour éviter tout risque de nouvelle contamination.

« Khroma » pendant l’exposition « Mammouths & Cie », Musée Crozatier, Le Puy-en-Velay, 2010

Khroma, un bébé mammouth découvert en 2009, a reçu un traitement de désinfection dans nos installationsPublié le 25 novembre 2016

  • ​Du 13 au 15 juillet 2010, le bébé mammouth Khroma, prêté par la Russie pour être exposé au musée Crozatier du Puy-en-Velay, a été traité par irradiation gamma pour inactiver les germes qu’il était susceptible de contenir. Ce traitement exceptionnel a été réalisé à la demande de Bernard Buigues, vice-président de l’International Mammoth Committee, et de Frédéric Lacombat, paléontologue du musée Crozatier.
  • Le professeur Petr Lazaref de l’IPES (Institut Polaire d’Ecologie appliquée) et Serguei Gorbunov de l’International Mammoth Committee ont suivi le bon déroulement des opérations. 

Ce projet a été réalisé, en collaboration avec la société CIC-ORIO, dans le cadre de « Marseille Provence, capitale européenne de la culture 2013 ».

Conservation et restauration d’un chaland romain prélevé dans le Rhône, durant l’été 2011, pour le Conseil Général du Rhône (musée Arles antique) :

JV7

Ce projet a été réalisé, en collaboration avec la société CIC-ORIO, dans le cadre de « Marseille Provence, capitale européenne de la culture 2013 ».

La restauration et la mise sur support d’une collection exceptionnelle d’épaves de six navires datant de la fin du VIe siècle avant J.-C. au IIIe siècle après J.-C., pour le musée d’Histoire de Marseille

Découverte par une équipe de l’Inrap en 2004, sur les bords de la Saône (parc Saint-Georges), avec quinze autres embarcations de toutes époques, cette barque du IIe siècle attendait son heure au fond d’un lac.

Chantier Lyon-Saint-Georges, épave 4 en cours de prélèvement

​Dans le cadre d’un contrat de la Métropole de Lyon, le chaland gallo-romain n°4 de Lyon-St-Georges a été prélevé fin janvier 2014 dans un étang des environs de Lyon où il était conservé depuis 10 ans, et acheminé en 6 tronçons dans les locaux d’ARC-Nucléart, pour y subir un traitement de conservation-restauration, puis un remontage complet sur un support à concevoir avant un retour dans un musée lyonnais (Musée de Lyon Fourvière).
Fort de l’expérience d’AR3 (Arles Rhône 3), une analyse poussée des risques liés à la présence de soufre a été menée très rapidement, et a montré que le taux de soufre était beaucoup plus élevé que pour AR3. On rappelle que ce taux est lié à la quantité de pyrite, qui est une phase sulfure de fer, initiatrice de la production  d’acide par réaction avec l’humidité de l’air.
En accord avec le comité scientifique du projet, un plan d’action en plusieurs étapes a été élaboré depuis le traitement jusqu’à la restauration, incluant un traitement préventif contre l’acidification, l’ensemble de tous les travaux étant mené dans des locaux à atmosphère contrôlée.

Après que le musée ait défini la position dans laquelle il souhaite exposer le bateau (position navigante) ainsi qu’une partie de la muséographie associée, la conception et la réalisation du support ont été réalisées par CIC-Orio, conjointement avec ARC-Nucléart.  Si une partie du support a été fabriquée dans les locaux de l’entreprise sous-traitante, le montage et l’ensemble des supports de pièces ont dû être découpés, ajustés, assemblés sur place, dans le bâtiment de montage, au fur et à mesure que les restaurateurs  disposaient les pièces de bois.
La sole, puis les bordés, puis les varangues et enfin les courbes  ont été tour à tour disposés, les monteurs chaudronniers préparant au cas par cas, selon les formes des objets, les supports et les fixations de ces pièces support en  métal.